Lymphœdème : définition, causes et traitement

Vous avez remarqué un gonflement d’une partie plus ou moins importante de votre corps, mais vous ne savez pas très bien ce qu’est un lymphœdème, on vous explique tout.

Qu’est-ce qu’un lymphœdème ?

Le lymphœdème est une affection chronique et progressive caractérisée par une accumulation excessive de liquide lymphatique dans les tissus, entraînant un gonflement localisé du membre concerné (œdème).

Cette accumulation résulte d'une déficience du système lymphatique, soit à cause de malformations congénitales et de mutations génétiques (lymphœdème primaire), soit à la suite d’une altération ou d’une obstruction des voies lymphatiques, par exemple à la suite d'un traumatisme (comme une chirurgie), d’une maladie maligne, d’une maladie veineuse, d'une infection… (lymphœdème secondaire)(1).

Cette maladie chronique et progressive a des conséquences non négligeables sur la vie des personnes atteintes, notamment car elle requière un traitement à vie. Elle peut en effet causer un inconfort, des difficultés à se mobiliser, entrainer une mauvaise image de soi, causer des infections de la peau récurrentes etc. si elle n'est pas correctement prise en charge(1).

Il n'existe pas de traitement définitif pour le lymphœdème, il n’est pas possible d’en “guérir” mais une prise en charge appropriée peut ralentir sa progression et minimiser les complications. Si vous souhaitez en savoir plus sur le fonctionnement du système lymphatique, pensez à consulter notre article.

Quelles sont les causes du lymphœdème ?

Le lymphœdème est provoqué par une incapacité du système lymphatique à drainer correctement le liquide lymphatique, ce qui entraîne une accumulation de liquide dans les tissus interstitiels (œdème). Il existe deux types de lymphœdème :

  1. Lymphœdème primaire : il est la conséquence d’anomalies congénitales (anomalies lors du développement) affectant le système lymphatique et le développement des vaisseaux et des ganglions lymphatiques(1,2). Ce type de lymphœdème est rare et concerne davantage les femmes (2/3 des cas)(3,10). Sa prévalence réelle n'est pas connue en France, mais il est estimé que cela concernerait moins de 1 personne sur 2 000(10).
  2. Lymphœdème secondaire : il est plus commun que le lymphœdème primaire et est dû à l’altération ou à l’obstruction des voies lymphatiques, par exemple à la suite d'un traumatisme (comme une chirurgie), d’une maladie maligne, d’une maladie veineuse, d'une infection, d’obésité etc.(1,2)

Dans les pays développés, la plupart des cas de lymphœdème secondaire sont dus à une tumeur maligne ou au traitement d'une tumeur maligne et le cancer du sein est le cancer le plus souvent associé à un lymphœdème secondaire(10).

Quels sont les symptômes du lymphœdème ?

Les principaux symptômes du lymphœdème incluent :

Gonflement et lourdeur
Le lymphœdème se caractérise principalement par un gonflement localisé, souvent des membres (bras ou jambes), mais peut aussi toucher les parties génitales, la tête, le cou et le tronc(2). Ce gonflement (léger ou sévère) est associé à une sensation de lourdeur. Le gonflement est généralement unilatéral (touchant un seul côté du corps) mais peut être bilatéral(1,10).

Inconfort et douleur
Le lymphœdème peut être douloureux et/ou inconfortable, en particulier lorsque le gonflement devient plus prononcé et que des complications surviennent. La douleur est ainsi secondaire au lymphœdème. Cela peut être dû à une sensation de tension dans la peau, des douleurs articulaires, une inflammation etc.(1,2,3,10)

Raideur et limitation de mouvement
Le gonflement peut entraîner une perte de mobilité dans la zone touchée, particulièrement dans les cas sévères. Cela peut affecter les activités quotidiennes comme marcher ou soulever des objets(1,10,8).

Changements cutanés
Au fur et à mesure de la progression du lymphœdème, la peau peut devenir plus épaisse, plus ferme, et une fibrose tissulaire peut apparaitre. La peau de la zone touchée par le lymphœdème devient également vulnérable aux infections telles que l’érysipèle(2,3,9).

Ces symptômes peuvent évoluer progressivement et doivent être gérés rapidement pour limiter la progression du lymphœdème.

Quelles sont les évolutions du lymphœdème ?

  • Stade 0

    C'est le stade « latent », ou « subclinique ». La capacité du transport lymphatique est réduite mais l’œdème n ’est pas visiblement apparent. Si la maladie est asymptomatique dans la majorité des cas, certains patients peuvent ressentir une sensation de lourdeur du membre affecté, d’oppression, de raideur. Ce stade peut durer des mois ou des années.

  • Stade 1

    L’accumulation de liquide lymphatique est visible mais s’estompe avec l'élévation du membre. L’œdème est donc “spontanément réversible”. L’œdème est indolore et présente généralement un excès de volume de moins de 20% par rapport au membre sain. La pression avec un doigt sur la partie gonflée peut laisser une empreinte sur la peau, c’est ce que l’on appelle le signe du godet. A ce stade, la peau et les tissus ne sont pas endommagés de manière permanente.

  • Stade 2

    Le membre atteint apparaît encore plus gonflé. L'enflure du membre ne régresse plus avec sa surélévation. Le signe du godet est bien présent. A ce stade, une augmentation de volume comprise entre 20 et 40% par rapport au membre sain est observée. La peau et les tissus commencent à s’épaissir à mesure que le volume du membre augmente.

  • Stade 3

    C’est le stade le plus sévère du lymphœdème. L’œdème est « permanent et irréversible ». Les changements cutanés s’intensifient, la peau devient plus sèche, plus épaisse et dure (fibrose). Le membre atteint présente un excès de volume généralement supérieur à 40% et une perte de mobilité importante. Le signe du godet n’est plus présent. De l’hyperpigmentation apparait avec une augmentation des plis cutanés, ainsi que des dépôts de graisse et des excroissances verruqueuses.

Quelles sont les conséquences du lymphœdème ?

Le lymphœdème entraîne des conséquences significatives sur la santé physique et psychologique des patients.

Gonflement chronique et gènes fonctionnelles
Le lymphœdème entraîne un gonflement persistant et progressif des membres affectés. Ajouté à la fibrose des tissus, cela entraine souvent une gêne fonctionnelle importante. En effet, le liquide lymphatique s'accumule dans les tissus, ce qui provoque une sensation de lourdeur, de raideur et d’inconfort. Des troubles musculosquelettiques peuvent par ailleurs survenir en conséquence de ce gonflement(1,10, 10).

Modification des tissus
Avec le temps, la rétention de liquide lymphatique va entrainer une fibrose (épaississement des tissus), une inflammation et un dépôt de tissu graisseux, rendant le traitement plus difficile et limitant la mobilité des patients. Cette complication aggrave le gonflement et contribue également à la gêne fonctionnelle(1,3).

Complications infectieuses
Les problèmes de peau sont fréquents chez les patients atteints de lymphœdème. L'enflure peut produire des plis cutanés profonds où des infections fongiques et bactériennes peuvent se développer(9). La stase lymphatique est aussi associée à une immunodépression locale dans la région concernée, et à des modifications inflammatoires locales, ainsi qu'à un risque accru d'infection : bactériennes (essentiellement l’érysipèle), infections fongiques (intertrigo), voire d’infections virales(2,10,12).

Impact psychologique et qualité de vie
Le lymphœdème affecte profondément la qualité de vie des patients, leur mobilité et leur perception d’eux même, pouvant provoquer de l'anxiété, de la dépression, et une diminution de l'estime de soi, ce qui contribue à une détérioration globale du bien-être émotionnel et social(10,12).

Quels sont les traitements et prise en charge du lymphœdème ?

La prise en charge du lymphœdème a pour objectifs principaux de réduire puis de stabiliser le volume, de prévenir les complications (comme l’érysipèle) et de faciliter leur prise en charge, de favoriser l'autonomie du patient et d'améliorer sa qualité de vie(3).

Le traitement précoce et rapide du lymphœdème doit être mis en place dès son diagnostic, afin de réduire le risque de développer des changements tissulaires irréversibles, comme la fibrose et le dépôt de graisse(3).

Le traitement, se fait en 2 phases distinctes : la phase intensive (= phase de réduction), aussi appelée thérapie décongestive complète (ou complexe) (CDT) puis la phase de maintien.

  • Phase intensive/ de réduction : elle vise à réduire le volume du lymphœdème de 30 à 40% et à apprendre au patient à s'autogérer et à prendre des mesures préventives. Cette phase inclue l’utilisation 24h/24 de bandages de compression pendant 1 à 3 semaines, la pratique d’exercice physique avec bandage, du drainage lymphatique manuel et des soins de la peau(3,13).
  • Phase de maintien : cette phase vise à obtenir une stabilisation à long terme du volume du lymphœdème, suite à la phase de réduction. Cette phase inclue principalement l’utilisation de vêtements de compression de haut niveau de pression en journée (pression la plus élevée tolérée). Les autres composantes de la phase de maintien comprennent toujours de l’activité physique, des bandages moins fréquents que pendant la phase intensive, l'utilisation éventuelle du drainage lymphatique manuel, des soins de la peau méticuleux et continus et un contrôle du poids(3,13).

D’autres techniques conservatrices peuvent être utilisées, sans pour autant avoir montré de preuves solides de leur efficacité, telles que l’utilisation de compression pneumatique intermittente (IPC), ou la balnéothérapie. De l’éducation thérapeutique est également nécessaire afin que le patient maitrise sa pathologie(3,13).

Des phases intensives récurrentes peuvent être nécessaires pour optimiser la gestion du lymphœdème.

Des interventions chirurgicales peuvent être envisagées dans des cas avancés, mais ces pratiques restent controversées selon leur type en raison d’évaluations insuffisantes sur les indications, leur méthodologie et leurs effets indésirables. Elles comprennent les chirurgies de reconstruction, les chirurgies de résection cutanée et la liposuccion. Les techniques chirurgicales visent à réduire le volume des tissus et à améliorer le drainage lymphatique(3,14).

FAQ du lymphœdème

Notre équipe médicale répond à vos questions.

  • Pour drainer le liquide lymphatique et prévenir l'accumulation dans les tissus (comme dans le cas du lymphœdème), plusieurs techniques peuvent être utilisées. Le drainage lymphatique manuel stimule la circulation de la lymphe et aide à évacuer l'excès de liquide vers les ganglions lymphatiques. La compression, favorise le drainage du liquide lymphatique en appliquant une pression constante sur les tissus et l'exercice physique adapté va stimuler la fonction des muscles, qui agissent comme une "pompe" pour aider à faire circuler la lymphe à travers le corps. Les dispositifs de compression pneumatique intermittente (IPC) (appareil de compression avec chambres gonflables) sont largement utilisées, bien qu’il n’y ait pas de preuves solides à ce sujet.

  • La lymphe est un liquide clair qui circule dans le système lymphatique, un réseau de vaisseaux et de ganglions répartis dans presque tout le corps. La lymphe remplit trois fonctions principales.

    D'abord, elle permet de drainer l'excès de liquide et de protéines des tissus vers le sang. En effet, les capillaires sanguins laissent naturellement s’échapper du liquide et des protéines dans les espaces interstitiels (espace entre les cellules des tissus). Ce fluide excédentaire est absorbé par les capillaires lymphatiques puis transporté par le réseau de vaisseaux lymphatiques vers le système veineux, où il est réintroduit dans la circulation sanguine, évitant ainsi l’accumulation. En parallèle, la lymphe contribue à la protection immunitaire en transportant des cellules immunitaires ; au passage dans les ganglions lymphatiques, elle est filtrée pour détecter et éliminer d’éventuels agents pathogènes. Enfin, le système lymphatique est essentiel pour absorber les graisses et certaines vitamines issues du système digestif et les transporter vers le sang(2).

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  2. Fletcher J, Borthwick Y, Elwell R et al (2024) Practical issues in applying compression garments and wraps for management of lymphoedema. Wounds UK: UK Consensus Document. (s. d.). Dans wounds-uk.comhttps://wounds-uk.com/wp-content/uploads/2024/10/MULTI24_CD_BLS_WUK_WEB-v3.pdf
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  6. Sleigh BC, Manna B. Lymphedema. [Updated 2023 Apr 19]. In: StatPearls [Internet]. Treasure Island (FL): StatPearls Publishing; 2024 Jan-. Available from: https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK537239/​
  7. Stolldorf, D., Dietrich, M., & Ridner, S. (2016). Symptom Frequency, Intensity, and Distress in Patients with Lower Limb Lymphedema.. Lymphatic research and biology, 14 2, 78-87 . https://doi.org/10.1089/lrb.2015.0027.
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  12. Fu MR, Ridner SH, Hu SH, Stewart BR, Cormier JN, Armer JM. Psychosocial impact of lymphedema: a systematic review of literature from 2004 to 2011. Psychooncology. 2013 Jul;22(7):1466-84. doi: 10.1002/pon.3201. Epub 2012 Oct 9. PMID: 23044512; PMCID: PMC4153404.
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  14. Vignes, S. (2024, 10 octobre). TISSU ADIPEUX ET LYMPHOEDÈME SECONDAIRE DU MEMBRE SUPÉRIEUR. https://www.ks-mag.com/article/13922-tissu-adipeux-et-lymphoedeme-secondaire-du-membre-superieur